La révolution silencieuse des tarifs, mais quels tarifs ?


Du Canada et des États-Unis jusqu’au Royaume-Uni, une vague de changements dans les frais d’interchange pour les paiements par carte Visa et Mastercard promet de réécrire les règles du jeu. Mais quels sont exactement ces coûts de commission et pourquoi est-il important de comprendre leur modèle de tarification ? J’explique cela dans ce post.

nous nous concentrons souvent sur de grands chiffres et des chiffres abstraits. Cependant, c’est dans les petites variations, comme les frais d’interchange appliqués aux paiements par carte internationale, que l’on retrouve les impacts les plus tangibles sur la vie quotidienne des entreprises et des consommateurs.

un sujet qui suscite une attention considérable à l’échelle mondiale. Est-ce que quelque chose commence à changer ?

La révolution silencieuse des tarifs, mais quels tarifs ?

Dans cet article, j’explique les modèles de commission appliqués par les systèmes internationaux comme Visa et Mastercard et je vous raconte ce qui se passe dans le monde en termes de réduction des frais, à la suite de ce que l’Union européenne a réussi à faire avec

Règlement UE 2015/751 (connu sous le nom d’IFR – Réglementation des Commissions d’Interchange).

Les modèles tarifaires des cartes internationales Visa et Mastercard

Pour les entreprises traitant des transactions par carte, il est crucial de comprendre les modèles de tarification adoptés par les systèmes de cartes internationaux comme Visa et Mastercard. Ces structures tarifaires déterminent combien les entreprises paient pour chaque transaction.

Nous examinerons deux modèles courants  : Échange Plus Plus (IC++) et Tarification mixte.

Échange Plus Plus (IC++)

Le modèle Interchange Plus Plus est souvent considéré plus transparent que d’autres. Il détaille les différents coûts impliqués dans une transaction, qui comprennent généralement les frais d’interchange, les frais du programme et la majoration de l’acquéreur.

  • Commission d’interchange (IF) : il s’agit d’une commission versée à l’Émetteur par le Système. Les frais varient en fonction du type de carte utilisée (crédit, débit, etc.), du mode de transaction (en ligne, en magasin, etc.) et de la banque du titulaire de la carte. Ces frais sont fixés par les Systèmes (Visa, Mastercard) mais reviennent à l’émetteur.
  • Frais du programme : il s’agit des frais que les systèmes de cartes comme Visa ou Mastercard facturent pour l’utilisation de leur réseau. Ces frais sont généralement fixes et identiques pour tous les commerçants.
  • Majoration de l’acquéreur : Il s’agit des frais que l’acquéreur de l’entreprise (détaillants, boutiques en ligne, professionnels, etc.) facture pour l’ensemble de ses services. Cette composante économique comprend généralement également les frais de traitement des services opérés par les passerelles de paiement (pour le commerce électronique et le m-commerce) et, uniquement en Italie, par ce que l’on appelle les « Gestore Terminali ».

Le modèle IC++ est transparent car il montre au commerçant où va chaque centime de ses frais de transaction. Cependant, cela peut également être complexe car les frais d’interchange et les frais du programme varient, ce qui rend difficile pour les entreprises de prédire exactement combien elles seront facturées pour chaque transaction.

Il est important de se rappeler que IF (frais d’interchange) et

MSC (frais de service marchand) ne sont pas la même chose. Bien que les frais d’interchange soient les seuls frais qui, s’ils sont établis dans le cadre d’accords multilatéraux dans le cadre de la politique du système de cartes internationales (auquel cas les frais d’interchange sont appelés frais d’interchange multilatéraux, ou MIF), le MSC est obtenu en calculant la somme des composantes économiques suivantes  : 1) la commission d’interchange ; 2) les frais du programme ; 3) la majoration de l’acquéreur.

Cela dit, dans un modèle de tarification IC++, il n’est pas toujours facile de comprendre le poids de la majoration de l’acquéreur dans le MSC. Cette observation est particulièrement importante pour les régions de l’UE/EEE où le règlement sur les frais d’interchange (IFR) est en vigueur, tel que prévu par le règlement UE 2015/751.

Dans l’UE/EEE, où les frais d’interchange sont plafonnés à au moins 0,2 % du montant du reçu pour les cartes de débit/prépayées, et à au moins 0,3 % du montant du reçu pour les cartes de crédit, il est possible de voir clairement le montant réel du MSC donne aux commerçants la possibilité de mieux comprendre la véritable majoration de l’acquéreur, leur permettant ainsi de négocier la meilleure valeur MSC, lorsque cela est possible.

Tarification mixte

La tarification mixte est un modèle de tarification simplifié où le commerçant se voit facturer un taux fixe pour chaque transaction. Ce taux comprend tous les coûts impliqués dans le traitement d’un paiement (interchange, frais du programme, majoration de l’acquéreur, tous coûts imputables au traitement), unifiés en un seul frais.

L’avantage de la tarification unifiée est sa simplicité. Les commerçants savent exactement combien ils paieront pour chaque transaction, ce qui facilite la comptabilité et les prévisions. Mais l’inconvénient est le manque de transparence. Les commerçants ne voient pas la répartition des frais et peuvent finir par payer plus pour certaines transactions, surtout si leurs clients utilisent principalement des méthodes de paiement qui, autrement, entraîneraient des frais d’interchange moins élevés.

Action gouvernementale et législative dans le monde entier pour réduire les frais d’interchange

Après avoir clarifié la structure tarifaire qui définit les frais facturés aux entreprises qui décident d’accepter les paiements par carte, découvrons maintenant ce qui se passe dans le monde par les gouvernements et les législateurs pour plafonner au moins une des composantes du coût : les frais d’interchange.

Que se passe-t-il au Canada

Au Canada, le gouvernement a récemment finalisé un accord important avec Visa et Mastercard. Cet accord est un souffle de soulagement pour les petites entreprises, qui bénéficieront d’une réduction des frais d’interchange sur les transactions par carte de crédit. C’est un

réduction jusqu’à 27% par rapport à la moyenne pondérée actuelle. Les frais de transactions en magasin seront notamment ramenés à la moyenne pondérée

taux annuel de 0,95%tandis que les transactions en ligne connaîtront une réduction 10 points de base.

L’accord réduit non seulement les coûts pour les entreprises, mais comprend également un accès gratuit aux ressources de prévention de la fraude et de cybersécurité. Les nouveaux tarifs, qui entreront en vigueur à l’automne 2024, devraient permettre aux entreprises admissibles d’économiser environ 1 milliard de dollars sur cinq ans.

Que se passe-t-il aux États-Unis

Aux États-Unis, la Réserve fédérale a proposé une réduction de près de 30% en frais d’interchange

pour les cartes de débit. Actuellement, les commerçants paient aux banques 21 cents plus 0,05 % du coût de transaction pour chaque paiement par carte de débit.

La nouvelle proposition suggère de réduire le composant de base à 14,4 centimes et le

ad valorem à 0,04% de la transaction, avec une augmentation de l’ajustement pour prévention de la fraude à 1,3 cents. Cette réduction entraînera une diminution globale de 28 %.

La Fed a également l’intention de mettre à jour cette limite tous les deux ans, sur la base des données de son enquête biennale auprès des grands émetteurs de cartes de débit. La proposition est actuellement en phase de consultation publique.

Que se passe-t-il au Royaume-Uni… après le Brexit

Au Royaume-Uni, le régulateur des systèmes de paiement (PSR) propose de plafonner les frais d’interchange transfrontaliers sur les cartes de crédit et de débit. Cette décision est motivée par l’augmentation des frais de Mastercard et Visa pour les transactions avec les cartes EEE acceptées par les entreprises britanniques après le vote sur le Brexit.

La proposition du régulateur comprend un plafond temporaire initial de 0,2 % pour les transactions par carte de débit des consommateurs au Royaume-Uni et dans l’EEE et de 0,3 % pour les transactions par carte de crédit. Il envisage également un plafonnement durable de ces frais à l’avenir, après une analyse plus approfondie.

L’objectif est de protéger les entreprises britanniques qui ont subi une augmentation de leurs coûts, estimée entre 150 et 200 millions de livres sterling l’année dernière, en raison de ces augmentations.

La proposition du PSR visant à plafonner les frais d’interchange reflète un alignement clair avec le règlement européen 2015/751, connu sous le nom de « Règlement sur les frais d’interchange IFR » (IFR). Ce règlement, adopté par l’UE, vise à limiter les FI pour garantir l’équité et la transparence sur le marché des paiements.

L’adoption d’une approche similaire par le Royaume-Uni après le Brexit témoigne d’une tentative de maintenir une certaine cohérence dans les pratiques du marché et de protéger à la fois les consommateurs et les petits détaillants contre des frais excessifs.

Conclusions

détaillant divers coûts tels que les frais d’interchange, les frais du système et la majoration de l’acquéreur. Bien que ce modèle puisse être complexe, il donne une vision claire de la destination des coûts pour chaque transaction. D’un autre côté, le Blended Pricing simplifie le processus mais au détriment de la transparence. Dans les deux cas, il est crucial que les entreprises comprennent ces structures de coûts afin de négocier les meilleures conditions possibles.

La « révolution silencieuse » des frais d’interchange s’installe à l’échelle mondiale, avec des impacts significatifs tant pour les entreprises que pour les consommateurs. Ce mouvement n’est pas seulement un phénomène isolé mais plutôt une tendance qui se consolide dans différentes parties du monde, démontrant une attention croissante portée à l’équité et à la transparence des coûts de transaction.

L’initiative du gouvernement canadien et les propositions de la Réserve fédérale américaine et du régulateur des systèmes de paiement du Royaume-Uni sont des exemples de la façon dont les autorités répondent aux besoins d’un marché en évolution, cherchant à équilibrer les intérêts des grands réseaux de cartes avec ceux des petits entreprises. Ces efforts reflètent une volonté croissante de réduire les coûts de transaction et d’offrir des conditions commerciales plus favorables.

Le modèle européen, en particulier, apparaît comme une référence en matière de réglementation des commissions d’interchange, montrant comment une intervention réglementaire bien réfléchie peut réellement influencer le comportement du marché au bénéfice d’un éventail plus large d’acteurs économiques.

En ce qui concerne l’avenir, il est raisonnable de s’attendre à de nouveaux développements et peut-être à de nouvelles politiques visant à réglementer ce secteur. À mesure que les commerçants et les consommateurs s’adapteront à ces nouvelles réalités, il sera essentiel de surveiller l’efficacité de ces changements et leur capacité à promouvoir un environnement commercial plus équitable et plus transparent. L’espoir est que ces changements allègeront non seulement le fardeau financier des petites entreprises, mais stimuleront également une plus grande innovation et compétitivité dans un secteur crucial pour l’économie mondiale.

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  • Le règlement UE 2015/751  : Le nouveau règlement européen sur les frais d’interchange dei pagamenti con carta  : capiamolo meglio, Garavaglia R. PagamentiDigitali, 11 juin 20215
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  • Les commissions de paiement avec carte : Les nouvelles commissions de paiement : capiamole meglio, Garavaglia R. PagamentiDigitali, 22 août 2013
  • Il Gestore Terminali : Monetica, questa strana parola…, Garavaglia R. blog CloseToPay, 16 avril 2008
  • Canada : Le gouvernement du Canada annonce la finalisation d’accords avec Visa et Mastercard pour réduire les frais de transaction par carte de crédit pour les petites entreprises, Gouvernement du Canada, 5 décembre 2023
  • États-Unis : la Fed confirme son intention de réduire les frais des cartes de débit, Finextra, 26 octobre 2023